Toute guerre...

Toute guerre s’attaque à l’idée même de naissance
Dr Ezzideen_page sur X
Depuis les premières années du XXe s., les guerres ne font pas que tuer, elles détruisent à partir du placenta des femmes, l'humanité dans la vie et le vivant

On dit que l’aide arrive à Gaza. On le dit en chiffres, dans des communiqués de presse, avec des formules polies et morales. Et le monde écoute, parce que c’est plus facile que de regarder. Convois. Mesures. Logistique. Quatre cents tonnes. Quatre-vingts camions. Est-ce que tu te sens mieux maintenant ?

Mais à Gaza, les enfants ne comptent pas. Ils attendent. Attendre du pain qui n’arrive jamais. Attendre que le monde lève les yeux de ses statistiques et se demande :

« Que faisons-nous ? Que sommes-nous devenus ? »

Les grands noms de l’humanitaire – l’UNRWA, la Croix-Rouge, Médecins Sans Frontières – ont confirmé l’impensable : ils n’ont pas le droit d’aider. Permission, comme si la miséricorde nécessitait une autorisation. Comme si sauver un enfant nécessitait la signature de ceux-là mêmes qui ont construit la clôture. Le peu qui entre à Gaza n’est pas de l’aide. C’est de la moquerie. Moins de 0,5 % de la nourriture nécessaire. Un pourcentage, une décimale. Pas une solution.

Pas d’espoir. Juste assez pour dire aux caméras : « Regardez, on s’en soucie. »

La nourriture n’est pas envoyée pour nourrir, mais pour faire taire.

Distribuer de la farine non pas aux affamés, mais aux gros titres. Nourrir la conscience du spectateur, et non le ventre de l’enfant. C’est un péché déguisé en bienveillance.

Et ils appellent cela une politique.

Ces dernières semaines, alors que les accusations mondiales se faisaient de plus en plus fortes, que le génocide par la famine se murmurait dans les parlements, les rédactions et les tribunaux, les détenteurs du pouvoir ressentaient la pression. Non pas pour mettre fin à la famine, mais pour contrôler le récit.

Ils ont donc agi, non pas pour sauver des vies, mais pour fabriquer un alibi. Laissez passer quelques camions. Laissez les caméras tourner.

Laissez des voix compatissantes pointer du doigt et dire : « Voyez ? L’aide est en route. Gaza n’est pas oubliée. »

Mais ce n’est pas du soulagement. C’est du théâtre. Une performance destinée à apaiser le monde extérieur, et non à préserver la vie à l’intérieur des murs.

L’objectif n’est pas de sauver, mais de préserver la réputation.

Et ça a marché. C’est toujours le cas. Certains gouvernements qui condamnaient autrefois détournent désormais les yeux. Les bandes-annonces ne parlent plus de famine, seulement de distribution d’aide. Le brouillard de la souffrance persiste, mais le prisme à travers lequel on la perçoit est désormais atténué, recadré, rebaptisé.

La famine continue. La faim persiste. Le nord de Gaza reste isolé.

Et pourtant, ils disent : nous avons un nouveau plan. Une distribution organisée. Quatre points d’aide dans le sud. Quatre pour deux millions de personnes. 500 000 par point d’entrée. Ce n’est pas de la planification. C’est du calcul cruel. Tu veux manger ? Tu dois marcher. Du nord, où tu es né. Au sud, où tu n’es rien. Et si tu pars, tu ne peux pas revenir. Cette route, une fois parcourue, devient un mur. Ou un cratère. Ou une tombe. Ce n’est pas la faim.

Ce n’est pas la guerre. Il s’agit d’une destruction délibérée d’un peuple. Le pain n’est plus du pain. Ce n’est plus le corps de la vie, c’est une arme. Un outil. Une bonne affaire.

« Viens », dit le sac de farine. « Viens plus loin de toi-même. »

Et les gens s’en vont. Ils y vont, non pas parce qu’ils le choisissent, mais parce qu’ils n’ont plus d’autre choix que de perdre.

Et que dit le monde ? Rien.

Non pas parce qu’il ne sait pas. Mais parce qu’il sait, et qu’il craint le poids de cette connaissance.

Ne vous mentez pas. Il ne s’agit pas d’aide humanitaire. Il ne s’agit pas de confusion morale. Il s’agit d’une théologie du mal, appliquée à des feuilles de calcul. Et un jour, quand les affamés seront réduits à l’état d’ossements, quand la terre sera vidée et les cartes réécrites, nous en répondrons. Ni à l’histoire, ni au droit. Mais aux enfants qui sont morts en attendant. Et au Dieu qui nous a regardés les regarder.

#GazaGenocide‌


 


 

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