Marichiweu !... Dix et mille fois nous vaincrons !
Au-delà du liminaire du Sous-Commandant Marcos, nous découvrons la parole en colère d'une Latino-Américaine anonyme qui vit de domesticité en Catalogne.
« MARICHIWEU » est le salut sous forme de promesse qu'échangent les gens du peuple mapuche (en Araucanie, dans les Andes chilienne et argentine) et que l'on pourrait traduire par « Dix et dix fois je me lèverai, dix et cent fois je reviendrai, dix et mille fois nous vaincrons »
_____________________
« Les actions parlent
Elles s’écrivent avec du sang
Perdurent
Et renaissent avec la nouvelle sève. » (Le Mont)
...
Rien à faire
Je ne peux tomber malade pas même d’une grippe
Car toute l’économie de ma maison se trouverait sens dessus-dessous
Je ne peux pas prendre quelques jours de congé
Et rester à la maison contempler le plafond
Même pas en pensée !
(Ne manquerait plus que me trouver sans travail !)
Mes os se plaignent
Se révèlent
Mes poumons étouffent
Ma colonne devient invertébrée
Mes jambes virent à la couleur bleuâtre
De grosses veines
Quand je marche, je sens la déchirure que provoque le fait d’avoir à tellement marcher
Mes mains ont des caresses
Chaudes et rugueuses
Archisèches
Mon royaume pour un jour de sommeil
Je me repose
De faire sans faire. (Rien à faire)
______________________
Sa lettre (extraits)
Je ne trouvais pas bonne l’idée que mon livre soit édité avec un texte du Sous-Commandant. Pourquoi ?... Aucune idée !... – Peut-être parce que je me sentais petite, si insignifiante comme ça, et, un peu, incrédule. Ce qui m’affectait le plus était que je suis si ordinaire ! et je m’interrogeais : quelles ressemblances pourrions-nous avoir entre votre lutte et celle que je vis ici chaque jour ? Il n’y avait pas d’autres réponses que la femme insignifiante que je suis, se levant à 5h30 tous les matins pour aller travailler et faire vivre sa famille comme ça, et, pas même de loin, rien ne ressemble à votre lutte, lutter pour le pain du jour, pour le lait chaud, non, dans ma lutte permanente il n’y a pas de maquis, il y a seulement du concret, le béton, le brouillard, les salaires minimums, l’insécurité de l’emploi, la privatisation de la santé, de l’éducation, l’argent qui ne suffit jamais. Pas même de loin, rien ne ressemble à votre lutte, et parfois, dans cette lutte, je me retrouve seule entourée par d’autres personnes qui élèvent la voix, mais qui rentrent ensuite à la maison continuer leur routine, je me sens seule, non, il n’y a rien qui ressemble à votre lutte.
[...]
Ça ne ressemble pas à votre combat où votre voix est entendue dans tous les coins de ce monde, peut-être mon combat, celui de tant d’autres comme moi, n’est pas très excitant, nous sommes insignifiants.
Il y a quelques jours, j’ai pris le temps, et j’ai commencé à lire les documents du Sous-commandant Marcos, et en ce moment, j’ai compris que personne n’est insignifiant, pas même une fourmi, nous faisons tous partie de quelque chose, nous contribuons d’une façon ou d’une autre à réaliser un combat pour la dignité de la classe opprimée, la liberté des peuples, oui, nous ne sommes pas, je ne suis pas négligeable, la lutte ne se limite pas à une personne ou à telle autre ; la lutte est la responsabilité de tous et de toutes, qui croyons qu’un monde meilleur est possible et à cet endroit et dans de nombreux autres, notre lutte, mon combat ressemble au vôtre. – Au tien.
C’est pourquoi je cesse de croire que vous ou votre texte ne seraient pas compatibles avec les miens
Parce que s’ils le sont, nous aimons, nous nous battons, nous protestons, nous souffrons, nous croyons, nous tombons et nous nous relevons ; je me suis aperçue que tout front peut être utile pour donner plus de lueur à nos consciences ; ça doit être mis à profit, car ce n’est qu’ainsi que nous serons plus forts ; c’est seulement comme ça que nous pourrons nous mettre en chemin d’une victoire ; c’est juste de cette façon-là que je pourrai regarder en face mes enfants et dire que je me suis battue, pour notre dignité, pour un monde meilleur.
Je suis une femme simple, sans aucune préparation académique ; je travaille en servitude ; j’ai été mère et père ; je me lève tôt comme la plupart, pour un salaire indigne ; mais je ne m’aplatis pas : je ne laisse pas l’ignorance me consumer ; je m’ouvre des espaces pour créer et partager ce qui sort de mon cœur ; et je trouve le temps que mon combat devienne ma raison d’exister ; je ne voudrais pas que cette lettre puisse causer quelque désagrément ; j’ai juste voulu donner à connaître qui est Marlene FEELEY ; je ne prétends à rien d’autre que partager mes sentiments.
978-2-919539-10-9
14 €
252
21 cm
15 cm
1.2 cm
351 g